Jeudi 23 octobre 2025
Journal du Combat #7
Chantier de la place du Colonel Fabien (de Juillet à octobre 2025)

Les travaux ont été ralentis par l’été, mais ont repris à la rentrée.

Les pavés qui recouvrent les trottoirs de la place sont acheminés par bateau. Je l’apprends en lisant l’information sur les grands panneaux installés sur le pourtour du chantier. Au début, j’avais du mal à y croire, mais j’ai vu passer sur le canal Saint-Martin une péniche dont les cales étaient remplies de ces pierres grises claires dont j’ai reconnu la disposition en tour. Par contre, je ne sais pas à quel endroit du canal elles sont déchargées pour être acheminées jusqu’à la place.

Cet été, la circulation automobile et celle des vélos et des piétons a plusieurs fois été modifiée pour permettre l’intervention sur certaines zones. Toujours la même technique. On déplace les panneaux de signalisation. On peint en jaune au sol de nouveaux passages piétons, sens de circulation pour les vélos et les voitures. On efface les anciennes marques en les recouvrant de peintures noires, au besoin on colmate un trou ou un nid-de-poule avec du goudron coulé à la hâte.

Avant que le terre-plein devant le siège du Parti communiste soit recouvert de terre, pendant plusieurs jours, les ouvriers ont réalisé un coffrage en bois dans lequel du béton a été coulé. J’ai pensé qu’il servirait à accueillir une construction lourde, comme cela avait été le cas pour le kiosque installé de l’autre côté de la place, mais finalement, il a été recouvert par un épais monceau de terre.

Les ouvriers ne travaillent quasiment jamais seuls. Plutôt en groupe. Et très souvent en binôme. Mais dans ce cas, lorsque l’un est à la tâche, l’autre lui parle et le regarde faire. C’est à tour de rôle de travailler. Quand on prête attention à ce que se disent les ouvriers, on se rend compte que le portugais est la deuxième langue la plus parlée sur le chantier après le français.

J’aime prendre en photo les ouvriers lorsqu’ils travaillent, mais parfois c’est un peu compliqué, car j’ai l’impression de les déranger. Je passe souvent sur le chantier lorsqu’ils font leur pause, ou le soir, ou le week-end, lorsqu’ils ne travaillent pas. Dans ces moments-là, je me concentre sur leurs outils (un seau, un marteau, une brouette, un balai, un casque, des gants, un tuyau) ou le matériel qu’ils ont laissé sur place (des sacs de ciment, du sable, des bidons), dans une nature morte qui évoque tout aussi bien le travail en cours.

Le gros œuvre, c’est assez rapide, ce sont les finitions qui prennent le plus de temps.

L’ensemble des trottoirs extérieurs, tout autour de la place, est en grande partie terminé. Il reste ça et là quelques finitions à terminer, ajouts de pavés, goudronnage, achèvement des branchements électriques au réseau principal), pour que les barrières soient enfin enlevées, mais dans certains endroits, on sent bien que l’espace s’est métamorphosé. Des perspectives s’ouvrent et s’élargissent, comme au niveau de la banque et de la pharmacie, où un très large passage piéton (bien qu’encore provisoire), peint en orange, renforce cette impression. L’arrêt de bus du 46 installé le long de la pharmacie du métro, avenue Claude Vellefaux apporte également un changement notable.

À certains endroits, il reste quelques pavés à tailler avant de finaliser un espace et de le rendre aux piétons, en enlevant les barrières, mais ça tarde. Les feuilles des arbres commencent à s’amonceler dans ces endroits, recouvrant les détritus et papiers gras qui depuis plusieurs mois y sont jetés dans ce que certains prennent pour une poubelle à ciel ouvert.

Début octobre, le sens de circulation a brusquement changé. Le côté du Générator ayant été fermée, les voitures ne peuvent plus traverser la place que d’un seul côté, en rejoignant le boulevard de la Villette ou l’avenue Claude Vellefaux. Au nouveau carrefour improvisé à cet endroit, qui forme un virage serré, les véhicules les plus grands (semi-remorques, bus ou camions) doivent manœuvrer lentement pour tourner et les embouteillages y sont de plus en plus fréquents. Régulièrement les agents de la police municipale sont obligés de passer plusieurs heures à faire la circulation en sifflant sans arrêt. Je ne sais pas si je ne préfère pas les klaxons.

La dernière phase du projet va concerner, pour les mois à venir et jusqu’à la fin de l’année, le terre-plein central de la place et du côté du Générator, près de la Grange aux Belles. Même si les trottoirs extérieurs du lieu ont déjà été pavés, la partie qui va être végétalisée ne l’est pas encore. Des barrières continuent d’en empêcher l’accès.

Après la première phase du chantier, j’ai hâte de découvrir le travail qui va être effectué au centre de la place, là où la végétalisation devrait être la plus importante. Lorsque je suis allé voir la place de l’hôtel de ville, j’ai trouvé que les arbres étaient très encadrés, contraints, contrairement à la forêt urbaine de la place de la Catalogne. La configuration des deux lieux expliquent ces impressions contrastées.

Les travaux aux abords de la place, ce ne sont finalement que quelques rares plantations pour tous les autres aménagements : l’élargissement des trottoirs, la facilitation des passages transversaux sur la place et de la mobilité des vélos (qui sont tout de même très encadrés par de hautes bordures et un sens unique de circulation), l’assainissement de la place et la sécurisation des installations électriques. Ce que je regrette c’est que l’ensemble reste pour le moment très minéral.

Photographies du chantier (de juillet à octobre 2025)

De plus en plus souvent, les passants s’arrêtent à ma hauteur pendant que je filme, on l’entend d’ailleurs dans une séquence de la vidéo. On me pose également des questions sur l’évolution du chantier, la discussion s’engage alors sur la durée et le but du chantier, et lorsque j’évoque la forêt urbaine, passé le moment de surprise, beaucoup de personnes passent par la place sans habiter le quartier ni être au courant de ce qui s’y passe au quotidien, les retours sont plutôt positifs. Les gens sont impatients, tout comme moi, de voir le résultat.

Vidéo du chantier (de juillet à octobre 2025)

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