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Au jour le jour #17

XVII

Journée grise de travail. Tous ensemble autour de la table de la salle à manger. Chacun derrière son ordinateur. Avançant à son rythme dans son projet.

Réveillé par le bruit d’une perceuse qui vrille le mur des voisins. Rire d’Alice. Dernière séance chez le kiné. J’esquisse un sourire sur la table de massage. Rêveur. En lisant les corrections d’Alice, je ris à mon tour. Je n’ai jamais eu peur de la répétition. Elle a écrit dans la marge : C’est bien mon loulou. Elle passe son temps à observer le manège des tourterelles dans le jardin. Berthe et Silva. Chaque jour est notre dernier jour.

Préparation de l’atelier Balbu-ciné. Thaumatrope, Phénakistiscope, Zootrope. Réfléchir à la décomposition du mouvement et faire en sorte que les images s’animent, que notre regard s’étonne. Ma première lanterne magique offert un Noël, pour mes huit ans il me semble. Couché dans la pénombre de ma chambre, je me souviens la projection de la bande lumineuse sur le bas de la porte. La satisfaction de terminer en un jour ce que tu croyais devoir faire en plusieurs. Scènes de danse à la fin du film de Chantal Akerman Toute une nuit. On entend la voix d’Aurore Clément pendant qu’elle danse avec son amant dans le couloir étroit de leur appartement et qu’on entend les bruits de la ville monter du dehors. Regarder le temps, pour mieux voir l’espace et nous le faire habiter ainsi en compagnie de tous les fantômes qui le hantent.

Dans la rue, une jeune femme promène son chien, sa laisse s’entoure plusieurs fois autour d’elle. L’élégance de son geste pour s’en extirper, sa chorégraphie. Interview d’une lectrice qui parle de son rapport à la lecture et à l’écriture. Jeux vidéo avec Laura. Les enfants jouent à tour de rôle pour tenter de trouver une issue. Derniers fous rire avec Marion. Un homme chante fort dans la rue. L’odeur du céleri sort du sac d’une femme.

Repas à Bastille avec mes parents, Caroline et Alice. Nina nous manque. Avec Alice nous raccompagnons mes parents à pied jusqu’à la gare de Lyon. Mon père avance lentement, un peu en arrière. C’est la première fois que je vois cette fébrilité en lui. Je rentre en marchant. Pour fatiguer mon corps. Toutes les images que je ne prends pas en photo, je devrais les décrire ici, sinon je les oublie. J’enregistre la bande son de mon film du mois. Ajustement du montage. Ce que je préfère.

La peur des personnes qui viennent nous demander conseils pour leurs problèmes informatiques. L’impression d’entrer dans leur intimité, leurs peurs les plus secrètes. Leurs manies pour ne laisser aucune trace en ligne. Tous les soirs, j’écris des phrases en anglais pour créer des images générées par Intelligence Artificielle. Je ne sais pas encore ce que je cherche. Je crois que c’est ce qui me motive. Ce mystère. Joan Fontcuberta par de « repenser la photographie et apprivoiser les monstres. »

Temps gris. Le Café des Dames est fermé. Je cherche un autre café pour manger. Une vieille voiture se gare rue de Meaux. Une Citroën Traction Avant. Le droguiste sort de sa vieille boutique pour prendre la voiture en photo. Raccord. Une femme noire passe dans la rue, ses longs cheveux en boucles bleus attirent mon regard. Le ciel se dégage en fin de journée.

Au jour le jour : bloc-notes quotidien

Édenville, le 28 avril 2010

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