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Au jour le jour #8

VIII

Revenir avec Caroline sur les lieux d’une précédente promenade en solitaire. Chapelle Charbon. En quelques mois le lieu s’est dégradé. Vitres brisées sur le chemin. Un jeune garçon s’amuse à faire rouler son skateboard rouge sur un banc en bois. La peinture d’un mur qui s’écaille et laisse apparaître la forme d’un pays imaginaire ou ma silhouette d’un homme. Une banderole rouge sur le fronton d’une école primaire : En lutte pour nos retraites. La notion de Journal de l’ombre (Shadow journal). S’exercer à se questionner au quotidien.

Allongé sur la table du kiné, je laisse mes pensées divaguer. Dans la répétition du geste. Massage de l’épaule. Jonquilles dans le jardin Éole. Chantier Hébert. Nouvelle nature urbaine, dans la continuité du quartier Rosa Parks. Sur la Petite Ceinture, la gare du Pont de Flandre. Limonade sur le quai désert. Lecture au soleil de Vingt-cinq photographies de Chris Marker, de Jacques Sicard. Je change plusieurs fois de place pour suivre le mouvement déclinant du soleil. Dans les arbres devant les Orgues de Flandre, le chant des oiseaux recouvre le bruit de la circulation. Cet ailleurs est toujours à réinventer dans la distance.

Temps partiel à 80%, la semaine désormais coupée en deux. Une autre façon d’aborder le travail professionnel et personnel. Froid le matin et très ensoleillé l’après-midi. Le contraste est saisissant. Les odeurs des fleurs d’arbustes. Première version du texte Comanche mis en page qui renforce ma première lecture admirative. La force d’un film qui te transporte dans son univers comme un documentaire interroge la réalité. Juste avant de se coucher.

Ciel couvert. Quelques gouttes de pluie. Atelier musique sur tablettes à la bibliothèque avec une dizaine d’enfants. La musique jusqu’à la cacophonie avec cependant quelques moments mélodieux d’écoute gracile. Omicron et son 1000ème sous-variant. Restaurant Les enfants perdus avec mon père et Caroline. Rôti de veau, pain perdu, et vin blanc de Loire. Ce soir Alice accompagne sa grand-mère à l’opéra Bastille voir Carmen de Bizet dans la mise en scène de Calixto Bieito. Mes parents dorment à la maison dans la chambre de Nina.

Pourquoi vois-tu je n’en sais rien ? Et pour combien de temps ? Peut-être pour toujours, peut-être pour quelques jours ? L’Auberge Café à Châtelet. Pierre et poutres apparentes encadrent une cheminée imposante dans ce bâtiment classé du tout début du XVIIe Siècle. Repas avec mon oncle et ma tante. La serveuse est ukrainienne et la cheffe est japonaise. Chat caramel. G. Detou, épicerie fine rue Tiquetonne. Retour à pied. Les rues envahies de touristes.

Il y a un an débutait la guerre en Ukraine. Un camion pompe à béton automotrice faisait une mauvaise manœuvre en reculant sur le quai de Jemmapes et se renversait au bord du Canal Saint-Martin. C’était le dernier jour de mes vacances. Dans la rue, une adolescente porte des baskets de couleurs et de marques différentes à ses pieds.

La sensation d’arriver au bout du roman. Je dois ôter encore quelques passages, en remanier d’autres. Délester le texte du superflu. On vit comme on raconte des histoires. Pour ne pas dire toujours, à élaguer, rogner, supprimer, plutôt qu’à ajouter. Le véritable ennemi, c’est l’esprit réduit à l’état de gramophone. Œufs à la coque et mouillettes ce midi, retour en enfance. Dans l’invisible avec bonheur. Noé est né.

Au jour le jour : bloc-notes quotidien

Casablanca (Maroc), le 21 février 2015

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