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Exercices d’équilibre n°2

Il y a deux temps seulement (un présent futur, et un passé qui peut être aussi un présent). J’ai voulu leur montrer qu’ils se trompaient de combat. Évidemment ça n’a pas marché, mais j’ai tenté. Je ne pense pas que tout soit terminé. Jusque là rien d’inquiétant. Les développements futurs ne dépendront pas seulement de la technologie, mais surtout de la façon dont les gens réagissent vis-à-vis de cette technologie interactive. Ainsi, dès que vous passez à proximité d’une de ces poubelles dites « intelligentes », toutes les informations de votre téléphone portable sont recueillies. Objectif : établir des statistiques sur les trajets d’un individu d’une poubelle à une autre et la régularité de ses habitudes. En évaluant les centres d’intérêts des passants, il est alors possible de leur adresser des publicités ciblées. Objectif : entretenir la flamme et faire passer les autres, tous les autres, pour des incapables. Une ville vide, sans personne dans les rues. Un débat peut en cacher un autre. Et derrière l’inventaire, c’est bien sa place et son avenir qui seront le véritable enjeu du débat. Ce n’est pas un exercice en chambre, cela nous oblige à nous projeter et donc à faire des choix. Dresser un pont entre ce qu’on a déjà fait et ce qu’on va faire. Ce qui compte, c’est le collectif. Un signe égale un sens égale un son. Avec de la mémoire, ça passe. Disons qu’à la longue le découragement a laissé la place dans l’esprit des présents à une forme d’ironie pourrissant la situation chaque fois un peu plus. On se retrouve souvent face à soi-même. Nous prenons avec nous à peine un petit nécessaire de nous-mêmes en quittant le passé pour le présent. Ensuite, tout vous échappe, ou presque.

Se plier au classique exercice du message de confiance. On a laissé les cités totalement à l’abandon. Or, pour casser cette spirale, il faut revenir aux fondamentaux. Comment se fait-il qu’aucun policier ne se déplace plus à pied dans la ville ? Nous devons rebrousser chemin. Mais ça ne veut pas dire que rien n’a été fait. L’idée c’est d’occuper le maximum d’espace et de montrer qu’un autre mode de vie est possible. Plus le monde accélère sa course, plus il est urgent de freiner, de prendre son temps et ses distances. Il y a d’abord les mots. Sur la vidéo, on entend un policier dire salope, connasse, ferme ta gueule à une femme qu’il est en train d’interpeller. Et le ton est monté. Vous avez voulu jouer au casino ? Pourquoi pas. Vous avez perdu ? Tant pis pour vous. Impeccable dans l’art du découpage. Ses amours, ses doutes, ses peurs, comme un fil d’Ariane pour mieux comprendre ses images, ses renoncements. Textes et photos se répondent et tentent. Dresser en filigrane le portrait de cet accroc du terrain. La photographie est mon langage. Après toutes ces années, j’ai l’impression d’être un salaud. Sur le point de repartir. Un enchâssement de perspectives mettant en scène tout un faux petit désordre de relations et de positions. On ne parle pas de travail, mais de temps de partage. L’exercice n’est pas du tout le même. Ce qui m’a frappé, c’est l’ignorance du sens des mots. Beaucoup de gens m’ont semblé avoir oublié que le fantasme n’est pas un passage à l’acte, mais une structure de l’imaginaire, nécessaire à l’épanouissement sexuel de chacun. De la vie avec de vrais morceaux de réel dedans.

Des pro-Morsi manifestent au Caire, le 16 août 2013, avant les heurts avec les forces de l’ordre (Hassan Ammar/AP/SIPA

Je vous invite à regarder un peu en arrière. J’adore regarder les gens. je le suis dit : c’est ça que je veux. C’est beau à regarder, les gens, ou quelquefois c’est très triste. Je ne suis pas là pour poser des problèmes. Moi, je veux apporter des solutions. Mais on ne change pas une société sans lui proposer de récit de ce changement. Or, qu’est-ce qu’un récit sinon la déclinaison d’une identité assumée. Plus aucun destin ne doit être joué à l’avance. Nous avons tiré collectivement les leçons du passé. Comment écarter la possibilité d’une mise en scène ou d’une provocation. Ils sont tombés comme des mouches. Ralentissement du rythme cardiaque jusqu’à l’arrêt total en quelques minutes, étouffements, nausées... Une provocation planifiée à l’avance. La voie est étroite. Tes yeux sont comme deux lames dans la lumière froide. Je n’ai pas envie de perdre mon temps. Je lis et j’écris tout le temps. Pour s’y retrouver dans la confusion de l’information, il faut distinguer deux problèmes. Tout ce que je peux vous offrir. Ce sont des conseils. Et mon conseil est simple : ne regardez pas vers le bas. Je mêle notes de travail et des éléments de ma vie privée. S’interroger sur l’actualité par la fiction. Tu vis dans une illusion. Ce n’est pas vraiment un journal, mais ça y ressemble. Cette dissatisfaction sans fin, ce désir ardent pour le quelque chose d’autre qui manque toujours, est une façon de penser dont nous sommes bien débarrassés, à mon avis. Le déclin n’est pas notre destin. Nous devrons conquérir cette liberté. Ce danger d’être là, dont on tire une émotion. Trouver par nous-mêmes le chemin qui correspond à nos aspirations. Préparons-nous ! Même le silence a une fin. Nos mots mêmes.

La première victime de la guerre, c’est la vérité. On doit poser des questions de la manière la plus forte possible mais pas essayer de donner des réponses, d’abord parce qu’il n’y en a pas. Nous serons là où nous devons être. Tous ensemble et pour longtemps. Il ne doit pas y avoir de retour en arrière. Le sourire tente de donner le change mais le regard et la voix ne trompent pas. Il s’accrochait à l’espoir de retrouver son œil. Tellement de promesses, si peu de résultats. Rien du tout, je n’ai rien eu à voir avec ça. Sa défense est peu crédible. Stratégie d’encerclement menée depuis l’origine. On ne veut pas entrer dans ces considérations. Il faudra attendre ses conclusions. Un non-rythme, épuisant : il fallait se fier à l’idée qu’on se révélerait dans l’ultime semaine. Et le soulagement survient quand trouve un bout de morceau. La promesse d’une chanson redonne confiance. Il n’y a jamais de moment parfait pour ce type de transition. Il suffit de laisser le temps faire son travail. Le réel dont nous ne voyons que ce que nous avons appris à voir. Il ne reste plus qu’une sorte de dessin étrange de la page, témoignage du plan de lecture. Les indices sont troublants : le jour des faits, les deux caméras de vidéosurveillance étaient en panne. Rien ne manque. Je n’ai jamais rien détruit. Ce rien qui te paraît manquer est une illusion. Le mot fantôme est parfait, il me convient bien. Il n’y a plus de catharsis aujourd’hui. Il n’y a plus de tragédie, nous vivons tous avec une mauvaise conscience et tout ce qui nous arrive, ce sont des histoires tristes.

Des pro-Morsi manifestent au Caire, le 16 août 2013, avant les heurts avec les forces de l’ordre (Hassan Ammar/AP/SIPA) Version recadrée par Libération

Ces exercices d’équilibre s’inspirent de ceux de Didier Arnaudet publiés en 2003, aux éditions Le Bleu du Ciel :

À partir d’éléments hétéroclites de conversations interrompues, de phrases sur tout et sur rien, de citations sans mention d’auteurs, de slogans politique ou publicitaire c’est au choix, de questions sans réponses ou d’idées toutes faîtes, le tout mis bout à bout, construire un curieux montage à la manière du copié/collé où des voix alternent sans chercher forcément à communiquer entre elles.

Cut-up réalisé à partir de ma lecture du journal Libération du 20 au 25 août 2013. Photographie de couverture : Des pro-Morsi manifestent au Caire, le 16 août 2013, avant les heurts avec les forces de l’ordre (Hassan Ammar/AP/SIPA)). Les autres photographies d’actualité trouvées via la recherche d’images similaires sur Google Images.


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