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Séance 305

Cet atelier figure dans l’ouvrage Comment écrire au quotidien : 365 ateliers d’écriture, édité chez Publie.net en version numérique et imprimée : 456 pages, 24€ / 5,99€.

Vous pouvez commander ce livre directement sur la boutique de Publie.net (une manière de soutenir la maison d’édition et ses auteurs) ou en ligne (Amazon Place des libraires, etc.) — et bien évidemment chez votre libraire en lui indiquant l’ISBN 978-2-37177-534-3, distribution Hachette Livre.

Proposition d’écriture :

Décrire une ville sous toutes les formes de nos souvenirs (ce que l’on appelle une vie, quelquefois un destin), en organisant l’autobiographie matricielle de celui qui, y étant né ou non, y a vécu, avec des phrases amples et sinueuses. Les strates de l’histoire s’y chevauchent, à la recherche d’une cité retirée parmi nos songes d’enfant déjà anachronique, mais l’espace biographique dévore la place que le hasard lui lègue. Pour chaque instant qui nous revient, le lieu qui correspond à telle activité significative, liée à la perception de celui qui l’écrit. Tous ces trajets, ces croisements d’émotions, de sensualité, de doute, d’égarement, tous ces éclats de mémoire forment bloc et scintillent, et se transformant en une multitude de « feux mal éteints » capables de nous guider longuement, d’un bout à l’autre de ce voyage urbain.

Fragments d’une ville fantôme, Lionel Bourg, 40 photos de Christian Guichard, Collection L’Ostiaque, Cadex Éditions, 1992.

Présentation du texte :

La ville, avec ses réseaux, ses sentes occultes ou ses avenues ostensiblement percées en plein réel, avec ses quartiers sombres, ses pans de lumière éclaboussant soudain les lambeaux d’affiches à ses murs lacérés, organise l’autobiographie matricielle de celui qui, y étant né ou non, promène par cette nature d’une espèce d’autant plus singulière qu’elle est davantage socialisée, l’humeur tramant jour après jour ce que faut de mieux l’on appelle une vie, quelquefois un destin. Les strates de l’histoire s’y chevauchent. À la recherche d’une cité retirée parmi les songes d’un adolescent sous bien des coutures déjà anachronique - ici, Saint-Étienne, mais l’espace biographique dévore les arpents que le hasard lui lègue-, c’est un monde que j’ai désiré caresser, une époque sans doute, je ne sais quelle densité individuelle et sociale en tout cas, en quoi l’imaginaire tint depuis toujours la place éminente qui lui revient.

Extrait :

« Mais c’est l’hiver qui délivre sans plus de détour Saint-Étienne à sa vraie dimension. Enneigée, couverte d’une parure que peu de passants ont foulée, ses rues blanchies et son artère principale ouatée d’une couche dissimulant rails et trottoirs, l’image en négatif de l’ex-Furiana démontre l’indéfectible rectitude de sa destinée. Là où tout est blanc, avenues et immeubles stéphanois esquissent l’envers fantomatique d’un paysage où les terrils luisent, dômes chinois, montagnes japonaises, et j’incline à penser que la calligraphie orientale saurait mieux en sublimer l’étrange solennité que mes vaines triturations lexicales. Aux confins du Sud, Saint-Étienne est un Nord, ultime langue de froid ou tête de pont que ne réduiront jamais la fourbe nonchalance et la dramaturgie des contrées écrasées de soleil.

On n’est certes « pas sérieux quand on a dix-sept ans », le serait-on davantage qu’il ne sied au gamin à peine capable d’opposer aux assis sa chevelure d’indien ou les assauts féroces de sa folle tendresse. À Chavanelle, il m’arrivait d’attendre le point du jour et de boire un café dans l’un des troquets où s’épuisent les fêtes d’écœurants noctambules : prostituées et camionneurs, tablée de cadres frissonnant autour d’une soupe à l’oignon, escarpes de basse volée voire militants retour d’un "collage", j’écoutais les rires et les conversations sans pouvoir me soustraire au désir indécis qui m’obsédait, ne regagnant qu’à l’aube mes pénates en poussant devant moi une boîte de conserve éventrée, dribblant des fantômes ou plaçant, au ras d’une bouche d’égout, un tir victorieux qui me privait du rêve grâce à quoi j’avais médusé mon marasme. traces, lambeaux, restes épars surnageant au gré d’une mémoire déjà lasse, ne puis-je décidément dépeindre qu’un Saint-Étienne dont ne subsistent que des vestiges ? »

Fragments d’une ville fantôme, Lionel Bourg, 40 photos de Christian Guichard, Collection L’Ostiaque, Cadex Éditions, 1992.

Auteur :

Lionel Bourg est un écrivain français né en 1949 à Saint-Chamond (Loire). Il réside à Saint-Étienne. Enseignant jusqu’en 1989, il se consacre depuis entièrement à l’écriture. Il est l’auteur d’une œuvre féconde et exigeante, réfractaire à tous les casernements, à toutes les forces d’avilissement de la pensée, et qui se construit en empruntant les chemins variés de la prose et du vers. Lionel Bourg a également publié un certain nombre de livres d’artistes, chez Fata Morgana, aux’’Editions Encre et lumière, à l’enseigne d’’’A travers’’ ou d’’’A la main’’, ainsi que sous les différentes raisons sociales imaginaires du peintre Jean-Marc Scanreigh. Il collabore à quelques revues (Le passant ordinaire, Théodore Balmoral, Souffles, ...Ca presse..., L’atelier contemporain, Travers, etc.). Traductions en italien, allemand, roumain, bulgare, grec et espagnol dans diverses revues et anthologies. Parmi ses derniers ouvrages : ’’L’immensité restreinte où je vais piétinant’’, La Passe du Vent, 2009. ’’L’Engendrement’’, Quidam, 2007. ’’Quelques ombres portées’’, L’Escampette, 2004. ’’Jardin de poupées’’, Fata Morgana, 2003. ’’Les montagnes du soir’’, Cadex, 2003. ’’La faute à Ferré’’, L’Escampette, 2003.

Liens :

Les éditions Cadex, éditeurs du livre de Lionel Bourg

De nombreux extraits de livres de Lionel Bourg

Présentation de l’œuvre de Lionel Bourg sur l’encyclopédie Wikipédia

Textes de Lionel Bourg dans la revue Passant Ordinaire

Page Lionel Bourg sur le site Lieux-dits

Présentation du Journal d’Anduze de Lionel Bourg sur le site de Terres de femmes d’Angèle Paoli


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